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Livret A 2022 : un compte épargne en eau trouble

Accessible dès la naissance et auprès de toutes les banques, le livret A est un compte épargne garanti par l’État. Il permet de mettre de l’argent de côté sans aucuns frais. Sécurisé et liquide, son plafond est de 22 950€. Il est à ce jour le livret d’épargne le plus plébiscité par les Français.

S’il présente aujourd’hui un taux de rémunération de 2%, c’est la première fois en dix ans qu’il est aussi élevé. Et compte tenu du rythme de l’inflation et du relèvement des taux interbancaires, le Gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a déjà prévenu qu’il fallait s’attendre à une nouvelle hausse en 2023.

Alors, vraie bonne nouvelle ?

Un livret d’épargne aux scores pharamineux

55 millions. C’est le nombre de livrets A, et donc de Français qui en possèdent un. Cela représente un taux de détention de près de 81% ! C’est le livret d’épargne préféré des Français, qui voient en lui un gage de sécurité et de liquidité.

C’est sûrement pour cette raison que son encours était de 324 milliards d’euros à fin 2021. Montant qui grimpe d’ailleurs à 343,1 milliards d’euros si l’on y inclut les personnes morales…

Rien qu’au mois de septembre 2022, la collecte du livret A s’établissait à 2,7 milliards d’euros. C’est plus de dix fois le montant de septembre 2021. Et si le mois d’octobre a été un premier mois de décollecte, c’est un total de 25,18 milliards d’euros qui ont été collectés depuis début janvier… soit près de 10 milliards de plus que sur les dix premiers mois de l’année 2021.

Depuis 2008, l’encours du Livret A a été multiplié par un peu plus de deux. Il représente aujourd’hui près de 40 % de l’encours total des produits de l’épargne réglementée. On peut justifier cela par différentes raisons. Les Français ont, depuis le confinement, pu bénéficier de différentes aides qui leur ont permis d’épargner davantage. Mais si c’est une bonne nouvelle pour l’épargne, cela n’est pas représentatif de l’état de santé des ménages Français.

En effet, entre incertitudes face au contexte économique français et international, la montée de l’inflation, ou la guerre en Ukraine, les Français privilégient aujourd’hui naturellement le placement.

Comme Alireza Gorzin, président de BFG Capital, le fait remarquer :

« Les Français ont peur de manquer d’épargne plus tard, mais ne prennent pas le temps de se renseigner davantage sur les placements efficients. S’ils bénéficient aujourd’hui de plus d’aides de la part de l’Etat, ils ne l’utilisent pas forcément à bon escient. Cela est principalement dû à un manque de culture F. Beaucoup confondent encore en 2022 le fait d’épargner et d’investir. Et beaucoup se laissent guider par la peur plus que par la raison. Conclusion : ils passent assurément à côté d’opportunités plus rémunératrices pourtant disponibles et tout autant accessibles. BFG Capital prend à cœur son rôle dans la démocratisation de la culture F* et prend le temps d’expliquer ces différences sur les réseaux. La peur, au lieu de figer l’épargnant, devrait être pour lui un moteur d’anticipation ».

Un livret pas si clair que ça

Si le livret A est une évidence pour la grande majorité des Français, il règne autour de son fonctionnement un mystère que personne ne cherche à élucider. Demandez à votre entourage de vous expliquer concrètement où va l’argent du livret A. Et dites-nous qui a réussi à vous répondre en commentaire !

Et pour cause. Garanti par l’Etat. Sécurisé. Liquide. Accessible. Disponible dans toutes les banques… Tous les feux sont au vert pour le livret A, afin que personne ne se pose de questions.

Aujourd’hui, les fonds collectés à travers le livret sont centralisés à la Caisse des dépôts et consignations. C’est donc la direction des fonds d’épargne de la Caisse qui gère financièrement les quelques milliards d’euros collectés par le livret A. En échange de cette centralisation des fonds, la Caisse verse aux réseaux collecteurs une commission.

Le saviez-vous ? Historiquement par exemple, le livret A finance le logement social. L’argent déposé sur les livrets A permettent entre autres le financement des HLM, leur réhabilitation, et depuis plus récemment le renouvellement urbain.

Mais les fonds collectés ne sont pas uniquement dédiés à cela. La Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) place aussi un certain budget sur les marchés financiers. C’est ce qui va lui permettre d’assurer une certaine liquidité. Le livret A permet également à la Caisse de faire des prêts aux PME ou d’accorder des micro-crédits.

Si les encours du livret A ont donc traditionnellement été dirigés vers des projets d’utilité publique, cela peut être amené à changer. En effet, en septembre 2022, la Cour des comptes a tiré la sonnette d’alarme. La structure de la Caisse des dépôts étant en pleine mutation, elle craint que l’épargne du Livret A ne soit dispersée sur des activités risquées (industrielles notamment) qui exposeraient les épargnants à davantage de risques, mettant en péril la garantie de l’épargne.

Avec une telle utilisation, l’épargnant, pensant mettre son argent à l’abri, devient finalement et indirectement prêteur de ses propres deniers… Il est donc essentiel de surveiller l’emploi des encours du Livret A, afin d’être certain de sa sécurité.

Mais là n’est pas le seul bémol.

Avec une inflation qui a dépassé les 6% en octobre, les rendements du livret A sont devenus négatifs en valeur nette d’inflation. Autrement dit, même si le taux de rémunération est récemment passé à 2%, les Français ne pourront pas vraiment profiter de cette hausse. Le pouvoir d’achat a clairement diminué et le coût de la vie quotidienne est plus élevé.

Alors, même avec une formule de calcul qui laisse présager une nouvelle hausse du rendement du livret A à 3% en 2023, gardons en tête que celle-ci ne fait que répondre à un taux d’inflation toujours en hausse.

Enfin, comme le rappelle Alireza Gorzin : « le Livret A doit être considéré davantage comme un amortisseur de l’inflation, plutôt que d’une solution d’épargne indéniable. En effet, depuis 1970, la moyenne du livret A à 3,85% a toujours été inférieure à la moyenne de l’inflation qui est de 4,06%. Si le livret A bat l’inflation 31 années sur les 52 observées, l’inflation, lorsqu’elle est supérieure, l’est avec des écarts bien plus considérables.

Depuis 2014, l’inflation a repris le dessus sur le fameux livret, et ce malgré les effets boosters lui ayant été apportés. Ceux-ci ont d’ailleurs eu davantage un effet annonciateur d’augmentation que d’efficacité économique… »